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Petites chroniques d'arrière-printemps en Méditerranée

 

Présentation de l'auteur
Petite chronique d'arrière-printemps en Méditerranée (1)
Petite chronique d'arrière-printemps en Méditerranée (2)
Petite chronique d'arrière-printemps en Méditerranée (3)
Petite chronique d'arrière-printemps en Méditerranée (4)
Petite chronique d'arrière-printemps en Méditerranée (5)
Petite chronique d'arrière-printemps en Méditerranée (6)
Chronique de février en Méditerranée
Chronique de février en Méditerranée (2)
Chronique de février en Méditerranée (3)

Chronique de février en Méditerranée (2)

Ils sont partis de Toulon ce matin et roulent en train vers Nice. Ils arrivent près de Saint-Raphaël. On voit un âne blanc.

–– Ce n’est pas un cheval ?

–– Non. C’était poilu avec de longues oreilles. C’était un âne blanc.

On voit plus loin, sur un balcon entraperçu du train, une somptueuse cage où sont des perruches bleues.

On dit :

–– Mais tu as vu, les perruches bleues ?

Le train s’arrête à Saint-Raphaël. Trois minutes d’arrêt.

On dit :

–– Saint-Raphaël, c’est joli.

Ainsi se passe le voyage. A regarder. A s’arrêter. A commenter l’insignifiant détail. A savourer ces joies furtives et d’autres futilités.

Puis ils arrivent à Cannes. On longe la mer de loin, on aperçoit une plage, deux jeunes filles se baignent, elles ont de longs cheveux, elles sont belles, elles sont vues de si loin, pourtant, un aussi bref instant…

Puis c’est Antibes. Déjà les couleurs de l’été. Des arbres. Des oliviers. Des pins. Et des allées de gravier fin. On se dit : " Ce n’est plus l’hiver, c’est l’été. Mais c’est l’hiver quand même, les gens sont en jaquette, en manteau. Ils ne savent pas que le printemps commence ? "

Et puis c’est Nice.

On dit :

–– Tu vois, on voit ici une très belle route à belle circulation, une très belle route à plusieurs voies. La mer, elle est derrière. C’est par une route comme celle-là qu’on entre dans La Siesta, la plus belle ville du monde.

La Siesta, c’est ici, qu’on pense. Même si cette ville n’existe pas. N’existe que dans une bande dessinée, dans " Chaminou et le Khrompire ", de Saive et Macherot, que l’on lisait quand on avait quinze ans. Depuis, on n’a jamais oublié La Siesta. On a toujours rêvé La Siesta. Et maintenant, on est à La Siesta.

–– ça fait quoi ? D’être à La Siesta, ça fait quoi ?

On ne sait pas répondre. On ne sait pas bien dire. On est content.

Et puis, entre Antibes et Nice, existe vraiment un lieu, un hôtel, une plage, un endroit, on n’a pas bien vu quoi, appelé La Siesta. Le nom s’étale en grand sur un panneau immense que l’on a vu du train. On n’en croyait pas ses yeux. Un signe, n’est-ce pas ?

A Nice, c’est carnaval, " Bataille de Fleurs " sur la Promenade des Anglais. Ce sont vingt chars décorés de fleurs fraîches qui défilent, vingt fois quatre à cinq mille tiges qui seront lancées au public par brassées. Pour ce cortège, ils arrivent trop tard, mais la foule est si grande qu’ils ne regrettent pas. Ils prendront plutôt place dans le petit train des touristes qui se faufile dans les ruelles de la vielle ville et monte jusqu’à la Colline du Château. C’est un endroit très romantique avec des cascades, des rocailles et des grottes, d’où tout en haut l’on surplombera la ville entière. On découvrira là qu’en effet Nice est peut-être la plus belle ville du monde.

Ils passeront la nuit ici. Et puis encore tout un jour. On verra des affiches où Ben annonce à la craie appliquée d’écolier en écriture blanche sur fond d’ardoise noire qu’il " cherche la vérité… ". C’est de la pub pour son exposition au Musée d’art moderne et d’art contemporain, promenade des Arts. On passera devant la galerie Ferrero où sont accrochées des œuvres de César et d’Arman. Ils se nourriront d’art ainsi et boiront des tequila sunrise sur une terrasse de la Promenade des Anglais. On inventera un nouveau cocktail, le " ron sunrise ", fait de rhum blanc, de jus d’orange et de sirop grenadine. Et l’on regardera la mer. Jusqu’à plus soif. A l’infini.

Et puis il faudra repartir. Ils reprendront le train direction Cannes, Fréjus, Les Arcs, Toulon.

Entre Saint-Raphaël et Carnoules, on demande :

— Quels sont ces arbres en fleurs ?

— Des amandiers.

On ne se lasse de les regarder. On se fond dans le paysage. Douceur ivresse de la vitesse. Des musiques bercent et entraînent très loin. Pour un peu, on se croirait ailleurs, dans un espace américain, tout en buvant du coca tiède. C’est ça l’ivresse, du train, du paysage, du bonheur d’un soir.

A 18 h 45, ils sont sur le balcon, déjà des tagettes y poussent. Le soir est doux dans cette ville dans le sud du Pays. Ils seraient bien restés à Nice. On resterait ici aussi. Ici partout quand le printemps en février commence.

© jean-pierre.cousin@bluewin.ch
me 21 – je 22/02/2001

 

Page créée le 01.08.01
Dernière mise à jour le 01.08.01

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