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Entretien avec Fabio Pusterla

par Mathilde Vischer
Eté 2000

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Fabio Pusterla par Yvonne Böhler

Fabio Pusterla, qui vit entre Albogasio et Lugano, est à ce jour auteur de plusieurs recueils de poèmes, d'essais traitant de littérature et de linguistique, et de nombreuses traductions, essentiellement du français en italien. Il a traduit notamment quatre recueils de poèmes et deux ouvrages de proses poétiques de Philippe Jaccottet, différents textes en vers et en prose d'Yves Bonnefoy, de Nicolas Bouvier, de Corinna Bille, et un roman de l'écrivain portugais Nuno Judice. C'est pour lui demander de nous parler de cette activité de passeur, qui lui a valu le prix Prezzolini en 1994, et de son point de vue sur les échanges littéraires en Suisse et en Italie, que nous l'avons rencontré à Lugano.

 

Comment avez-vous commencé à traduire ?
Pouvez-vous décrire brièvement votre parcours de traducteur ?

J'ai l'impression d'avoir fait très tôt l'expérience d'une sorte de processus mental de traduction, né du travail scolaire qui, ici en Suisse, favorise l'apprentissage des langues. Mais cela n'aurait pas eu de conséquences sans deux petits événements qui, un peu par hasard, m'ont poussé à réfléchir plus sérieusement à la traduction. Tout d'abord, une question polémique qu'une amie a posée à plusieurs écrivains lors d'une rencontre littéraire, et qui était à peu près celle-ci : Vous connaissez seulement la littérature italienne, ou vous vous intéressez également aux littératures étrangères ? Cette question m'avait interpellé, et j'ai commencé alors à m'intéresser plus aux littératures d'ailleurs. Après quelques temps, suite à une lecture publique, j'ai eu une discussion sur la littérature contemporaine avec un ami. Cet échange m'a amené à lire Bonnefoy, tout d'abord les premiers recueils (Du mouvement et de l'immobilité de Douve) puis toute l'œuvre. J'ai été séduit par sa poésie, mais j'étais incapable d'expliquer par des mots ce qui me plaisait tant. M'est alors venue l'idée qu'en étudiant cet auteur, son œuvre et ce qui a été‚ écrit sur lui, je comprendrais également mieux la littérature italienne contemporaine. C'est ainsi que j'ai étudié son œuvre et que j'ai commencé à traduire les seuls textes qui n'avaient pas été traduits en italien, ceux de l'Anti-Platon, qui sont les poèmes les plus anciens que Bonnefoy considère comme propres. Ensuite, lorsque nous avons créé, avec des amis, la revue Idra, nous avions prévu qu'il y ait une partie consacrée à des traductions de l'allemand et du français. A ce moment, je commençais à découvrir Jaccottet ; les premiers livres que j'ai trouvés de lui étaient l'édition Poésie/Gallimard de 1971, et un volume de Chants d'en bas. J'ai traduit les huit textes de Leçons pour Idra, et ces poèmes ont suscité un certain intérêt en Italie ; on m'a ensuite proposé de traduire les textes de Jaccottet pour Einaudi.

Avez-vous collaboré avec les auteurs que vous avez traduits ?

J'ai collaboré avec tous les auteurs que j'ai traduits, sauf Yves Bonnefoy. La collaboration avec Jaccottet a été très importante, tout d'abord parce qu'il connaît bien la langue italienne, ensuite parce que sa grande expérience de traducteur lui permet de déceler d'emblée les difficultés qui peuvent se présenter. Il est une des rares personnes que je connaisse qui parvienne à aider tout en sachant rester en retrait, il est à la fois précis et généreux. Cette collaboration assez profonde m'a permis également de mieux évaluer mon propre travail, il pouvait me dire si j'exagérais, si j'allais trop loin dans une certaine direction, cela m'a permis d'éviter de rendre les traductions trop proches de mon propre travail poétique. C'est toujours un danger en traduction. J'ai travaillé à la traduction d'une anthologie de jeunes auteurs français peu connus des Italiens, qui paraîtra en Italie (parmi eux : Jean-Pierre Colombi, Bernard Chambaz, Jean-Michel Maulpoix, Martine Broda, Bernard Simeone, Yves Pichet). Outre la difficulté du choix des textes, j'ai surtout voulu veiller à ne pas rendre les traductions similaires. Certains auteurs, qui connaissaient l'italien, ont voulu collaborer à la traduction. L'un d'eux, qui était très méticuleux, a même décidé à la suite de l'une de mes propositions, de changer l'un des vers de son propre poème, parce qu'il préférait la traduction. Ainsi, la traduction peut également modifier l'original ! Il disait que la traduction italienne correspondait mieux à ce qu'il cherchait à dire.

Comment vivez-vous cette double activité de traducteur et de poète ? Qu'est-ce qui vous intéresse dans le processus de la traduction ?

C'est une question importante. Il est clair que c'est une double activité, mais en même temps elle est quasiment unique. D'habitude, quand je traduis quelque chose d'important, je ne parviens pas à écrire. Et vice versa. Ce n'est pas seulement une question de temps, cela tient plutôt au fait qu'il s'agisse de deux activités très semblables, malgré leurs différences. Paradoxalement, quand je traduis, j'ai l'impression d'écrire, au degré extrême de l'écriture. Ce que je dois écrire est donné, est déjà fixé, le travail doit donc être concentré sur la manière d'écrire. C'est une activité très belle mais totalisante et, dans un certain sens, extrême. Mon écriture personnelle se fait à des rythmes discontinus et lents, j'écris de toute manière peu, cela se marie donc très bien à la traduction. Lorsque j'ai fait d'autres travaux, de critique, ou de recherche littéraire, il n'y a pas eu le même problème d'exclusion d'une activité par rapport à l'autre. En même temps, et parce que la traduction oblige à réfléchir exclusivement sur la manière d'écrire, c'est une des activités les plus riches en découvertes, également pour l'écriture personnelle. La distance juste face à l'œuvre d'un autre est difficile à trouver. Jaccottet, par exemple, a toujours voulu se tenir à distance des textes qu'il traduisait. En théorie, il a parfaitement raison, mais en pratique, dans l'absolu, c'est impossible.

Dans quelle mesure la confrontation avec la langue poétique d'un autre (et le fait de devoir mettre sa propre poétique entre parenthèses) a ouvert de nouvelles voies dans votre recherche poétique personnelle ?

Je crois, en effet, à une certaine influence de la traduction sur ma propre écriture. Au-delà de l'influence qu'un auteur particulier peut avoir sur nous, ce qui importe est le fait de devoir "sortir" un peu de soi-même. Traduire, c'est comme être acteur, il faut entrer dans les vêtements de quelqu'un d'autre. Il faut donc "se freiner". C'est important en général. Aujourd'hui, dans la poésie européenne, le discours sur le "moi", sur la nécessité de modifier le "moi", est central, et cela de toutes les manières possibles, de l'effacement de Jaccottet à mille autres possibilités. Traduire aide à aller dans cette direction.

Vos deux derniers ouvrages semblent s'ouvrir à une versification plus libre et plus ample, à des mouvements prosaïques et narratifs qui n'apparaissaient pas auparavant. Pensez-vous que le fait d'avoir traduit les œuvres de Jaccottet, notamment certains recueils de proses comme Paysages avec figures absentes, a pu vous permettre d'expérimenter ces formes rythmiques nouvelles ?

C'est une chose que j'ai perçue dès le début de mon travail de traduction de Jaccottet. Jaccottet parle, dans La Semaison, de deux polarités de son travail poétique, la poésie en vers et la poésie-conversation (qui se réfère aux textes plus longs et plus rythmés). J'ai été surtout frappé par cette seconde modalité (je l'ai découverte avec Chants d'en bas) ; il me semblait percevoir, en traduisant, que le problème ne se posait pas en termes métriques, mais rythmiques. Le rythme suit en quelque sorte l'onde de la pensée et qui ressemble à la prose. Cela m'a obligé à expérimenter ces formes plus longues en italien, auxquelles je ne serais peut-être pas arrivé seul. Dans l'esprit de tout écrivain italien, l'hendécasyllabe est inévitablement fixé, parce qu'il fait partie de la poésie italienne. En traduisant Jaccottet, j'ai dû aller un peu au-delà de l'hendécasyllabe, allonger ou séparer les vers les diminuer à l'intérieur d'un seul vers. Et je crois que cela m'a aidé à écrire des poésies plus longues, à éveiller en moi l'intérêt pour une poésie plus ample.

Un aspect particulièrement intéressant du style des textes en prose de Jaccottet, les "tâtonnements descriptifs", les textes à plusieurs voix, est qu'il semble refaire le processus même de la traduction, dans cette recherche de la parole la plus juste possible. Il semble ouvrir, ou révéler le procédé mental de la traduction dans un dialogue qui ressemblerait au dialogue entre les deux langues auxquelles est confronté le traducteur.

L'expérience de Jaccottet, qui utilise les tâtonnements descriptifs pour écrire, chercher à exprimer, et non pour traduire, est en effet très proche de ma propre expérience de la traduction qui, je crois, vaut pour tous ceux qui cherchent à approcher l'œuvre d'un autre. Même si je partage l'idée selon laquelle la traduction représente l'expression critique la plus haute, il me semble que cette expression critique est provisoire, c'est à dire que les traductions ont une histoire et vieillissent, changent, même si apparemment elles restent fixes. Elles correspondent à un certain moment de la littérature et de l'histoire. Ce qui m'a frappé dans les textes en prose de Jaccottet, et plus particulièrement dans Paysages avec figures absentes, c'est que s'il insiste sur sa tentative d'éviter les images, il les utilise en fait énormément. Ce livre explique de manière implicite mais très claire, à quel point écrire, en réalité, est traduire. La langue que l'on utilise n'est pas notre propre et vraie langue, il écrit en français, mais il doit trouver un français, en tâtonnant, qui corresponde profondément à l'expérience qu'il a vécue et qu'il aimerait exprimer. C'est ce que vit toute personne qui écrit. On touche là au point d'union le plus profond entre l'activité de traduction et celle de l'écriture personnelle. Dans les deux cas, il faut inventer quelque chose et traduire quelque chose.

La recherche de la parole la plus "juste" possible, en poésie, vous paraît-t-elle semblable dans l'activité poétique et dans le travail de traduction ?

Elle est à la fois semblable et différente ; dans l'écriture personnelle, cette recherche est plus difficile, pas techniquement, mais au niveau des variables en jeu, qui sont plus nombreux. Il y a la justesse stylistique, formelle, très proche de celle que l'on cherche en traduction, et la justesse de l'expression, plus évidente pour l'écriture, qui est celle de parvenir à exprimer ce que l'on ressent de manière confuse. On part de rien, ou de quelque chose d'obscur. Lorsqu'on écrit une lettre, par exemple, on ne sait pas toujours exactement ce que l'on va dire, on en a une connaissance vague, et on cherche par les mots à définir toujours mieux cette sensation. Parfois on y arrive, parfois non. Ce problème existe moins pour la traduction. En traduction, la difficulté de trouver des équivalents, des compensations dans notre propre langue, se pose de manière plus forte. Tandis que le donné de la poésie, le contenu, l'émotion exprimée sont d'habitude assez clairs (sauf dans certains cas). Dans l'écriture personnelle, il s'agit de chercher à comprendre ce qui se passe intérieurement, ce qui aimerait s'exprimer et ensuite, de l'ajuster stylistiquement. Ce sont deux choses un peu différentes, même si elles ont des ressemblances.

Quels sont les auteurs que vous aimeriez traduire, et pourquoi ?

Ceux que je ne pourrai jamais traduire, les grands auteurs russes. Je ne connais pas le russe et je ne l'apprendrai pas. J'aimerais traduire Dostoïevski !

Venons-en à présent à des questions d'ordre plus général, sur les échanges littéraires en Suisse. Pourriez-vous vous situer par rapport aux auteurs suisses d'aujourd'hui, les auteurs suisse allemands, romands et tessinois ?

Ce n'est pas facile de répondre à cette question car je crois qu'il y a, au fond, très peu de rapport entre les aires linguistiques et culturelles de la Suisse. Je peux difficilement me situer par rapport aux écrivains de la Suisse française et de la Suisse allemande parce que je suis de langue italienne. Il me semble qu'un Suisse allemand et un Suisse romand devraient répondre de la même manière. Dans ma conscience culturelle, la Suisse n'est pas présente en tant qu'entité culturelle avec laquelle je puisse me mettre en rapport. Cela m'intéresse d'un autre point de vue, celui du lecteur ou du traducteur de la littérature produite dans les autres régions culturelles de la Suisse, mais de la même manière que celles de l'Europe, selon la langue. Mais il me semble que cette perception est très différente selon les différentes régions de la Suisse. En Suisse allemande, j'ai l'impression qu'il y a une dimension identitaire culturelle forte, et peut-être cette sensation de pouvoir exister en tant qu'auteur d'une certaine région de la Suisse existe-t-elle également dans la Suisse française. Au Tessin, cela n'est pas possible, c'est trop petit. Par conséquent, pour exister en tant qu'écrivain, on doit sentir une certaine appartenance à la littérature italienne. Cela signifie que je peux tout aussi difficilement me situer par rapport aux autres écrivains de la Suisse italienne. Nous ne nous comparons pas. Nous nous connaissons, sommes amis, mais chacun suit sa route, qui se trace à travers la littérature italienne. Le Tessin, de ce point de vue, n'est pas un lieu de référence, nous sommes tous un peu comme des nomades. Il me semble que c'est différent pour des écrivains de la Suisse française, où j'ai parfois l'impression d'une certaine fermeture. Il faut dire que Milan ne joue pas du tout le même rôle pour les Tessinois que Paris pour les Romands. Milan ne semble ni particulièrement lointaine, ni particulièrement hostile. Cela vaut pour beaucoup d'autres villes italiennes. L'Italie a toujours eu une culture décentrée et fragmentée en régions.

Est-il facile de publier en Italie ? Les revues sont-elles encore un moyen pour les auteurs de se faire connaître et d'être publié ?

Aujourd'hui, les revues n'ont pratiquement plus le rôle de charnière entre l'écrivain et la maison d'édition. Les critiques non plus, malheureusement. Les éditeurs, d'habitude, n'ont plus aucun intérêt critique, ils le disent de manière explicite. Ils publient selon des paramètres qui sont différents, sauf certains petit éditeurs. C'est un problème d'industrialisation de l'édition. Récemment, j'ai entendu un entretien d'un journaliste avec un grand éditeur qui disait une chose pouvant sembler honteuse, mais qui reflète bien la réalité : Nous avons déjà tant de difficultés, pensez-vous, si nous devions en plus nous occuper des critiques ! La difficulté de publier en Italie me semble la même pour un écrivain tessinois que pour tous les écrivains italiens. Pour la poésie, évidemment, c'est très difficile, parce qu'il y a aujourd'hui peu d'éditeurs qui publient des textes poétiques. Pour les romanciers, qui sont peut-être moins nombreux au Tessin, la difficulté réside dans le fait que le critère principal des choix de l'éditeur est celui de la vente. La difficulté de publier, il me semble, n'a rien à voir avec le fait d'être au Tessin.

Les livres publiés au Tessin sont-ils bien diffusés en Italie ?

Jusqu'à aujourd'hui, le problème était le suivant : les livres publiés au Tessin, qui sont parfois de très beaux livres comme objets, ne se trouvaient pas dans les librairies italiennes. Depuis un an, le directeur des éditions Casagrande travaille à un projet très courageux, qui est celui de créer une collection qui sera distribuée officiellement en Italie. Cela signifie un changement énorme, presque anthropologique, et qui exige une restructuration de toute la maison d'édition. Il est nécessaire de faire une vraie programmation avec un certain nombre de titres par année, six mois d'anticipation, il faut respecter les délais, et publier des livres en se préoccupant du fait de devoir les vendre en Italie. Cela change tout, et à mon sens en bien. Nous sommes pour l'instant encore dans la phase d'expérimentation.

Quels sont les auteurs italiens qui ont le plus d'importance pour vous actuellement ? Que pensez-vous de la production poétique actuelle en général ?

Il y a bien sûr les grands classiques, ceux de la génération de Montale, puis Vittorio Sereni, le Tessinois Giorgio Orelli, Giorgio Caproni. En ce qui concerne les auteurs contemporains, j'ai lu d'abord de manière presque frénétique tout ce qui paraissait, pour me faire une idée de la littérature actuelle. Maintenant, je sais mieux ce qui me plaît et je lis donc certains auteurs de manière plus constante. Avec certains, j'ai un rapport de collaboration et d'amitié, les autres, je les lis de la même manière que tous les autres auteurs. Je suis notamment les parutions de deux auteurs d'à peu près mon âge, Milo De Angelis et Valerio Magrelli. Parmi les auteurs moins connus, mais très intéressants, il y a Umberto Fiori, un poète milanais, Francesco Scarabicchi, qui vient d'Ancone. Certains ont également eu un rôle intellectuel important, comme par exemple Antonio Porta. C'était quelqu'un de très actif, plein d'initiatives, qui discutait beaucoup, qui cherchait de quelque manière que ce soit à s'opposer à cet espèce d'"aplatissement commercial" auquel nous assistons actuellement. Il réussissait à être au centre du pouvoir éditorial, sans se brûler trop. Il avait un peu le même rôle qu'a eu Vittorio Sereni chez Mondadori, dans le sens où il n'était pas un simple fonctionnaire. Maintenant, depuis dix ans, cette figure d'écrivain-éditeur n'est plus présente. Il y a soit les écrivains qui n'ont pas voix au chapitre soit les fonctionnaires. Quelquefois, ce sont des fonctionnaires écrivains, mais le fait qu'ils écrivent n'a alors pas d'importance. Il est malheureusement difficile d'avoir accès aux textes des auteurs actuels qui font des choses intéressantes en poésie, ceux-là ont heureusement un public, plus "souterrain". Le fait que la publication de poésie soit fractionnée parmi les petits éditeurs, indépendamment de la valeur objective des œuvres, rend la possibilité d'accéder aux textes et de suivre les publications de certains auteurs plus difficiles. Qui a la chance d'être publié dans une collection plus connue est inévitablement plus lu.

Pensez-vous qu'il y aurait un moyen d'améliorer les rapports entre les quatre régions linguistiques de la Suisse ?

Je pense que oui. La première chose serait de renforcer les structures qui existent déjà et qui fonctionnent de manière incertaine, comme par exemple la collection CH. Il serait en effet nécessaire d'améliorer les rapports entre les régions, la traduction est un très bon moyen. Le travail qui peut se faire par les éditeurs, mais aussi par les revues, est très important. C'est ce que nous avons essayé de faire avec Idra. Il me semble que c'est un travail qui n'est pas difficile et qui est très utile. Ce qu'il faudrait pouvoir intensifier dans chaque région, c'est la curiosité, que ce soit par les revues, l'édition, la traduction, ou par la simple connaissance personnelle. Il faudrait également atténuer la peur, celle de se perdre ou d'être englouti par les autres, car il n'y a pas de raison de craindre cela. Vu de l'extérieur, de l'Italie, les gens croient que nous vivons dans une espèce de "paradis culturel", mais ce n'est pas vrai. Il y a évidemment le problème des dialectes, surtout en Suisse allemande. Sans cette curiosité, nous manquons de belles occasions.

Propos recueillis et traduits par Mathilde Vischer

 

Bibliographie sélective

Oeuvres poétiques

-Concessione all'inverno, Casagrande, Bellinzona, 1985 (prix Montale et prix Schiller).
-Bocksten, Marcos y Marcos, Milan, 1989.
-Le Cose senza storia, Marcos y Marcos, Milan, 1994 (prix Hermann Ganz et prix Valle del Metauro).
-Danza macabra, Lietocollelibri, 1995.
-Bandiere di carta, Scandici, 1996.
-Isla persa, I Semi del Salice, Locarno, 1998.
-Pietra sangue, Marcos y Marcos, Milan, 1999 (Prix Schiller).
-Laghi e oltre, avec Alida Airaghi et Anna Felder, Lietocollelibri, 1999.

Essais et éditions critiques

-Cultura e linguaggio della Valle Intelvi, avec Claudia Patocchi, Senna Comasco, 1983.
-Lombardia, avec Angelo Stella et Cesare Repossi, La Scuola, Brescia, 1990.
-Vittorio Imbriani, Romanzi, Racconti e prose, 3 vol., Longanesi-Guanda, Milan, 1992-94.

Traductions

-Philippe Jaccottet, Il Barbagianni ; L'Ignorante, Einaudi, Turin, 1992.
-Philippe Jaccottet, Alla luce d'inverno ; Pensieri sotto le nuvole, Marcos y Marcos, Milan, 1997.
-Philippe Jaccottet, Edera e calce, Ancona, 1995.
-Philippe Jaccottet, Libretto, Schweiwiller, 1995.
-Philippe Jaccottet, Paesaggio con figure assenti, Dado/coll. CH, Locarno, 1996.
-Nuno Judice, Adagio (traduit du portugais), Sestante, Ripatransone, 1994.
-Nel pieno giorno dell'oscurità. Antologia della poesia francese contemporanea, Marcos y Marcos, Milan, 2000.
-Idra, Via Bregansona 6, 6900 Lugano, Ed. Marcos y Marcos, Milan. Premier numéro paru en 1990.
-Nel pieno giorno dell'oscurità. Antologia della poesia francese contemporanea, Marcos y Marcos, Milan, 2000.
-Le Cose senza storia, Marcos y Marcos, Milan, 1994 et Pietra sangue, Marcos y Marcos, Milan, 1999.

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Page créée le 01.07.00
Dernière mise à jour le 01.07.00

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