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Daniel de Roulet
Daniel de Roulet, Nationalité frontalière, chroniques, Editions Métropolis, 2003

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Retrouvez également Daniel de Roulet dans nos pages consacrées aux auteurs de Suisse.

  Daniel de Roulet/ Nationalité frontalière
 

ISBN 2-88340-136-5

Comment dépasser le nationalisme, cette conscience qui nous colle à la peau ? Est-ce que quelques principes mondialistes suffisent ? Et à quoi ressemblerait une modeste démarche pour apprendre à piétiner les frontières...? Celle qui consiste à aller s'installer de l'autre côté d'une frontière est-elle suffisante, puisqu'elle permet de regarder la France et la Suisse d'un même regard, avec la même nostalgie, sans se laisser prendre aux pièges de la patrie... mais est-ce la bonne méthode ? Telles sont les questions que se pose Daniel de Roulet. Tout au long de ces chroniques, l'auteur regarde la France à partir de la Suisse, puis inverse son point de vue. Il parle des paysages suisses, de ses artistes, ses politiciens, ses commémorations, ses Juifs. Non sans humour, avec l'ironie du contrebandier, l'auteur réclame le statut de Julien Gracq revendique pour ses personnages : NATIONALITE FRONTALIERE.

Daniel de Roulet, né à Genève en 1944, a passé son enfance à Saint-Imier. Il a vécu à Zurich et à Genève. Architecte et informaticien de formation, il est l'auteur de nombreux romans et essais. Il vit en ce moment de l'autre côté de la frontière jurassienne suisse, à Frasne-les Meulières, en France.

Daniel de Roulet, Nationalité frontalière, chroniques, Editions Métropolis, 2003

 

  La Suisse en contrebande par Jean-Louis Kuffer

La Suisse en contrebande

LITTÉRATURE ROMANDE Dans Nationalité frontalière, Daniel de Roulet pratique à merveille l'art du décentrage, en multipliant ses points de vue. Avec humour, chaleur et pertinence.

Si les dissertations portant sur l'identité suisse sont le plus souvent assommantes, il est assez regrettable, en revanche, que les écrivains de ce pays, en Suisse romande tout au moins, ne s'engagent pas plus dans l'observation et la discussion des particularités de la petite mosaïque culturelle que nous constituons au sein de l'Europe. Plus qu'un idéologue ou qu'un historien, un journaliste ou un politicien, un écrivain nous semble, et d'abord parce qu'il travaille le matériau de la langue, le capteur sensible le mieux approprié, sinon à la définition, du moins au repérage «en mouvement» de caractères (plus ou moins) communs et de façons (plus ou moins) caractéristiques de vivre (plus ou moins) ensemble.

C'est du moins la réflexion que nous inspire la lecture des chroniques réunies par Daniel de Roulet dans Nationalité frontalière où, loin de définir la Suisse et ses habitants, l'écrivain s'attache à une suite d'observations qu'on pourrait dire «par défaut» ou par mises en rapport diversement éclairantes, comme le firent en d'autres temps un Charles-Albert Cingria ou un Robert Walser, autres saute-frontières.

Genevois de naissance mais Jurassien de c¦ur (il y a passé son enfance et dit aimer plus que tout la «permanence, l'immobile beauté du Jura») pratiquant le bilinguisme mieux que certains de nos douaniers, et farouchement attaché à notre pratique séculaire de la démocratie directe, Daniel de Roulet a fait l'expérience récente de «vivre un pays de l'extérieur» en s'installant à Frasne-les-Meulières, sur France.

De ce lieu qu'il commence à décrire par petites touches où apparaissent aussitôt des «nuances» françaises, il ne va cesser de se déplacer, dans ces chroniques, d'un côté à l'autre de la frontière et de bien d'autres, à travers l'Europe, le monde et le temps, de la Chine de Mao à l'ère, en Suisse, des fiches ou à celle des sans-papiers.

«Je suis Suisse et me soigne sans devenir Français, Algérien ou Américain», écrit-il au commencement, précisant qu'il est «à peine migrant économique au gré des circonstances, ne s'intéressant pas à conquérir la capitale ou la langue standardisée. Mon projet est tout petit. Juste habiter de l'autre côté pour gagner un peu de distance.» Puis de noter une «mélancolie à tout casser», un funeste «mal du pays», relent de «patriotisme clandestin» dûment chassé à coup d'ironie, avec l'espoir un jour de «traverser les frontières en riant».

Mais cela signifie-t-il, pour autant, que les frontières n'existent plus à ses yeux? Au contraire: le recul accuse les différences. Le «ton» du Jura français, très finement observé, se distingue du «ton» du Jura suisse, de même qu'une vache suisse, dans une écurie nettoyée comme une patinoire, risque une chute qui est épargnée à sa cousine hexagonale. Des premiers plans de la vie quotidienne, Daniel de Roulet étend ensuite son observation de manière beaucoup plus ample et de plus en plus intéressante. En pèlerinage au village proustien d'Illiers-Combray, il confronte la langue du cher Marcel au nouveau langage des temps qui courent (en face du porche de l'église, c'est l'inscription: «Les Verts, j'adhère, ensemble donnons du sens à l'avenir»...), comme cette même question du langage l'occupera un autre jour à La Muette de Pully, à propos de Ramuz, dans une réflexion à contre-courant sur les positions, le style et l'improbable postérité de l'écrivain. D'une soirée avec Agota Kristof, il traduit avec empathie la situation persistante de telle «personne déplacée». Puis le voici à l'inauguration ubuesque d'un bâtiment griffé Botta à la mémoire de Dürrenmatt, récupéré de façon éhontée.

D'un tour de Suisse «en un jour» avec son fils, il dégage notre imbrication multiculturelle, avant qu'une visite d'Auschwitz en compagnie de jeunes gens férus de kung-fu ne resitue son propos par rapport à l'histoire contemporaine, éclairée autrement encore par le rapprochement inattendu de la Chine de Mao et de Lavaux à l'ère des multinationales.

La Suisse des frondeurs

Un hommage à Paul Grüninger (ce gendarme suisse non aligné qui sauva plusieurs milliers de juifs) nous rappelle que la frontière entre «bons» et «mauvais» Suisses n'est pas plus fiable que les mythes de l'innocence ou de la perversité foncière de notre pays.
D'excellents exemples, tels Hodler le peintre, ou l'ex-ambassadeur Paul Wurth que scandalise le rapport de l'Office fédéral des étrangers de 1997 (auquel il va dire son fait à Berne en compagnie de l'écrivain), illustrent enfin la conception saine, frondeuse mais jamais dogmatique non plus de la démocratie vécue que Daniel de Roulet continue «malgré tout» de prôner et de vivre à sa façon, en citoyen autant qu'en écrivain.

Daniel de Roulet, Nationalité frontalière, Editions Métropolis, 2003

Jean-Louis Kuffer

 

  Extraits de presse

Chroniques sans frontières

[...]
Daniel de Roulet s'est posté au bord de la frontière [...] pour observer la Suisse, "vivre de l'extérieur" son pays de naissance. Il aimerait apprendre à franchir les barrières en riant et guérir de son "infection patriotique". Commence un long travail d'observateur impliqué et ironique.

[...]
Hélas, un patriotisme clandestin sommeille en lui... Fortes et mélancoliques, ces chroniques esquissent le portrait d'une Suisse tiraillée par la modernité. Elles se résignent à la terre natale, en quelque sorte.

Daniel de Roulet, Nationalité frontalière, Editions Métropolis, 2003

Isabelle Falconnier

24.04.03

Ecrire sur rien

"Exilé" en France, l'auteur suisse observe au jour le jour les variations frontalières

[...]
Nous voici donc avec lui, de ci, de là, une frontière de temps en temps, un peu ridicule à son avis mais qui fouraille quand même son intimité de Suisse quand, côté France, il se sent étranger.

[...]
Il dit quelque part "les frontières, on s'en fout", et le problème est réglé.

Cependant, il ne l'est pas. Plus elles passent ; plus ses chroniques délaissent la France pour s'alanguir côté suisse, attirées par la rage de leur auteur à comprendre pourquoi, sacré nom de bleu, il est Suisse et pas autre chose.

[...]
On se fout de la frontière, mais la frontière ne se laisse pas faire.

Daniel de Roulet, Nationalité frontalière, Editions Métropolis, 2003

Joëlle Kuntz

03.05.03

Poètes, vos papiers !

CHRONIQUES
[...]
Daniel de Roulet observe la France, la Suisse, et surtout la frontière. Bizarre objet virtuel, symbole des pires nationalismes et des rejets vers la mort, la frontière lui inspire une suite de chroniques, Nationalité frontalière, pour reprendre la très subtile expression de Julien Gracq. Une réflexion [...] qui consiste surtout à défendre l'idée que les artistes n'ont pas de papiers d'identité. [...] Mais plutôt un génie du lieu qui les inspire.
[...]

Daniel de Roulet, Nationalité frontalière, Editions Métropolis, 2003

Jacques Sterchi

17.05.03

 

Page créée le: 20.06.03
Dernière mise à jour le 23.06.03

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