Chudi Bürgi - Coordinarte

Notre invitée de ce mois, Chudi Bürgi, intervient ici au nom de Coordinarte : un organisme qui a pour vocation de donner une visibilité à des artistes, musiciens et écrivains issu de l'immigration en Suisse. Coordinarte anime son propre site, www.coordinarte.ch

Entretien

français

Coordinarte se propose comme point nodal d'un réseau, et permet de découvrir et de contacter de nombreux artistes venus de l'étranger qui résident et travaillent en Suisse. Comment est né ce projet?

Le réseau Coordinarte fait partie des activités de l'organisation "Culture et Développement", qui fut fondée il y a presque vingt ans par diverses œuvres d'entraide suisses comme branche culturelle commune. A l'origine de cette organisation se trouvent des personnes comme Annemarie Friedli et Al Imfeld, qui se passionnaient depuis longtemps pour la richesse culturelle et artistique de l'Afrique, de l'Asie et de l'Amérique latine. Les œuvres d'entraide voulaient opposer aux images de famine et de misère provenant des pays pauvres des aspects positifs, susceptibles d'éveiller l'intérêt et le respect et pas seulement la pitié. Et cela à une époque où de larges couches de la population - je parle ici pour la Suisse alémanique - ne connaissaient presque rien de la création artistique de ces continents et où presque aucun artiste originaire d'Afrique, d'Asie ou d'Amérique latine ne vivait en Suisse. L'organisation a commencé par soutenir des publications et des tournées de lectures ; elle invitait aussi des artistes à participer à des ateliers, par exemple pour qu'ils transmettent leur savoir en matière de technique de tissage traditionnelle. En tant que réseau bénéficiant d'une large présence sur Internet, Coordinarte existe depuis huit ans. Outre son travail de documentation, il sert de plate-forme permettant de faire connaître les artistes au public et de l'informer sur les événements liés à la présence artistique et culturelle des continents "du Sud" en Suisse.

Le réseau de Coordinarte, centré sur les artistes venant de pays d'Asie, d'Amérique latine et d'Afrique, avec quelques présences du Sud-Est de l'Europe, s'intéresse donc en priorité aux représentants de pays en développement. Le multiculturalisme Suisse en lui-même intéresse-t-il Coordinarte?

Partant de ce que je viens de dire, il est clair que l'organisation "Culture et Développement" - et avec elle le réseau Coordinarte - ont leur racine dans la coopération au développement. Elle est d'ailleurs encore largement financée par la DDC. Au cours des vingt années de son existence, les priorités se sont déplacées vers les artistes vivant en Suisse et la scène culturelle. L'orientation géographique en direction de l'Afrique, de l'Asie et de l'Amérique latine demeure une priorité importante, mais elle ne doit pas être comprise dans un sens strict. L'engagement en faveur d'une Suisse multiculturelle nous tient beaucoup à cœur ; l'accent que nous mettons sur les pays non européens se justifie cependant par le fait que nos manières de les aborder sont imprégnées de clichés, d'incompréhension et d'ignorance. Les artistes et leurs œuvres peuvent largement contribuer à une ouverture et à une perception plus différenciée et moins crispée.
Coordinarte essaie aussi d'établir des contacts entre la Suisse romande et la Suisse alémanique ; les artistes vivent souvent dans des mondes séparés et se produisent à peine dans l'autre région linguistique.
Il faut encore rajouter que Coordinarte vit une phase de profonds changements; d'ici la fin de l'année 2007, il se peut que notre champ d'activités subisse de nouvelles modifications; les œuvres d'entraide n'en seront plus les organisations responsables.

Une prise en compte des auteurs immigrés par la Collection ch (qui soutient de manière décisive la traduction d'œuvres littéraires entre langues nationales) a-t-elle été envisagée à votre connaissance ?

Notre tâche est de donner à la littérature d'immigration une visibilité publique et de sensibiliser les personnes concernées aux questions qui se posent dans ce contexte. La discussion suscitée par la parution du livre Küsse und eilige Rosen a ainsi permis que, dans certains cantons, les services chargés de l'encouragement de la culture ont accepté des manuscrits qui n'étaient pas écrits dans une des quatre langues nationales. La question de savoir si le Collection ch pourrait s'ouvrir à cette littérature mériterait d'être examinée.

La tradition pluriculturelle suisse favorise-t-elle spécialement, à votre avis, une démarche comme celle de Coordinarte? D'autres pays ont-ils des organismes analogues à Coordinarte, reconnus institutionnellement ?

Outre sa tradition pluriculturelle, il se peut que la taille réduite de la Suisse permette à une petite organisation comme la nôtre de réaliser une documentation relativement riche. On trouve cependant des institutions en partie similaires dans d'autres pays européens. La plus proche est l'Institut de Vienne pour le développement et la coopération (VIDC) en Autriche. Il existe aussi des institutions semblables en Allemagne, mais elles sont organisées à l'échelle des Länder ou en fonction de certains domaines, comme la "Société pour l'encouragement de la littérature d'Afrique, d'Asie et d'Amérique latine" à Francfort. Nous savons qu'il existe aussi des institutions issues de la coopération au développement et/ou de la discussion sur l'immigration au Benelux et dans les pays scandinaves.

Comment jugez-vous l'accueil réservé par le monde culturel suisse aux artistes que vous présentez ? Je pense bien sûr au public, mais aussi aux artistes suisses - Coordinarte a-t-elle par exemple permis depuis sa naissance des collaborations entre artistes suisses et immigrés ?

Les artistes originaires d'Afrique, d'Asie ou d'Amérique latine sont souvent confrontés à des attentes précises de la part du public, qui veut quelque chose de "typique": un africain doit jouer des percussions et raconter des contes, un argentin faire du tango et une autrice arabe écrire sur le voile, etc. Chaque artiste a sa manière de répondre à ces attentes: il peut s'y conformer et jouer à fond sur les aspects exotiques de son origine, les faire éclater, jouer avec, les renverser ou les ignorer. Plus les artistes vivent longtemps en Suisse, plus des collaborations avec des artistes suisses voient naturellement le jour. Nous souscrivons bien entendu à ces projets, mais ne voulons ni les idéaliser ni les forcer. Une telle collaboration n'est pas en soi garante de qualité. Cela demande souvent du souffle et de la patience, ainsi qu'une grande disponibilité de chacune des parties à écouter l'autre. Pour le Fonds culturel Sud, il est primordial que les artistes d'Afrique, d'Asie et d'Amérique latine y assument le rôle principal. Dans le domaine de la musique, il est fréquent que des musiciens suisses (moyens) fassent appel à des musiciens "exotiques" (souvent très talentueux) pour se mettre en valeur ; dans de tels cas on ne peut pas parler de véritable échange ou de rencontre artistique.

On trouve à travers Coordinarte de très nombreux musiciens, ce qui ne suprend pas, des plasticiens aussi. La littérature pose naturellement de manière plus aiguë le problème de la langue (si l'on excepte quelques écrivains africains d'expression française). En quels termes se pose-t-il (aussi bien pour vous que pour les auteurs concernés)?

Les auteurs qui n'écrivent pas dans une des langues nationales ne peuvent souvent pas se faire connaître à un large public. Leur public se trouve peut-être dans leur pays d'origine ou dans le cadre restreint des associations culturelles existant chez nous. Alors que les auteurs suisses ont déjà de la peine à trouver un éditeur, la difficulté est d'autant plus grande pour une publication en langue étrangère et presque insurmontable pour un manuscrit qui n'a pas encore été publié.
Notre objectif est d'établir un contact avec le public, mais nos possibilités sont limitées. Par exemple, pour organiser des lectures de dimension modeste en Suisse alémanique, il est important que le texte soit disponible en allemand et que l'auteur puisse communiquer dans cette langue. Or les auteurs qui remplissent ces conditions sont peu nombreux. L'aide accordée aux traductions joue ici un rôle capital. Le Fonds culturel Sud, géré par Culture et Développement sur mandat de la DDC et de Pro Helvetia, ne peut soutenir que ponctuellement des publications bilingues permettant à un auteur d'avoir accès au public suisse.

Comment découvrez-vous les auteurs immigrés en Suisse? Dans quelle mesure viennent-ils à vous, dans quelle mesure allez-vous à leur recherche?

Des auteurs nous contactent régulièrement et nous envoient leur manuscrit. Je suis tout simplement fondamentalement curieuse: je travaille depuis longtemps dans ce domaine - j'ai aussi travaillé comme journaliste littéraire - et je suis très attentive aux nouveaux auteurs et m'informe sur leurs textes. Nous aimerions établir une documentation sur ces auteurs ; les découvertes exceptionnelles sont rares.

Justement, l'évaluation qualitative doit être pratiquement impossible pour des raisons linguistiques dans la majorité des cas. Quels moyens avez-vous de contourner cet obstacle ?

Nous essayons de faire appel à des personnes spécialisées et d'obtenir le plus d'avis possible de lectrices et lecteurs. En tant que centrale de documentation, nous ne devons heureusement pas établir de jugement définitif sur une œuvre. Nous pouvons cependant procéder à une certaine évaluation.

Dans le cas de personnes ayant quitté leur pays pour des raisons politiques, on peut imaginer que leur objectif peut être simplement de pratiquer leur travail ; mais on imagine aussi que l'enjeu puisse être témoigner pour le public suisse (comme le fait par exemple Yusuf Yesilöz dans La route du couchant, écrit, rappelons-le, directement en allemand), ou de continuer à atteindre les lecteurs de leur pays sans être inquiétés. D'après votre expérience, lesquels de ces cas de figure sont-ils le plus fréquents ?

Il faut distinguer entre les personnes qui exerçaient déjà une activité littéraire dans leur pays d'origine et celles qui sont venues à l'écriture durant leur exil ou en raison de celui-ci. Pour les premières, la poursuite de cette activité est importante et leur cadre de référence reste souvent leur pays d'origine ou la diaspora. C'est le cas par exemple des nombreux poètes originaires du Kosovo qui vivent en Suisse allemande. Pour les autres, c'est le caractère extrême de l'expérience que représentent la fuite et l'exil qui rend nécessaire ou possible l'écriture, que ce soit pour venir à bout d'un traumatisme ou consolider sa propre identité dans un environnement étranger. Cette écriture directement liée à la migration s'adresse souvent au public suisse. (Il est difficile de dire quel "cas de figure" est le plus fréquent. S'agissant des auteurs qui écrivaient déjà chez eux, le premier est certainement le plus fréquent.)

En 1998, vous avez été co-rédactrice avec Christine Tresch et Anita Müller du volume Küsse und eilige Rosen. Die fremdsprachige Literatur der Schweiz. C'était la première anthologie de littérature suisse d'immigration que j'aie lu, probablement la première tout court? Elle m'a beaucoup impressionné, c'était comme une porte inattendue qui s'ouvrait sur une réalité complexe, à la fois sociale et littéraire, que le volume ne pouvait que suggérer. Il a joué un rôle décisif dans la reconnaissance de ce que l'on a parfois appelé la "cinquième littérature de Suisse" - une appellation d'ailleurs contestable, moins heureuse en tout cas que la formule qui sert de sous-titre à votre livre - et qui était alors un concept très récent, pour moi du moins. Une première question à ce sujet: comment est né et comment a évolué ce concept de "cinquième littérature"? Et comment a évolué la réception de ce concept - et de cette littérature?

D'après ce que je sais, le concept de "cinquième littérature de Suisse" a été créé par Christoph Vitali, qui était responsable de la présence suisse à la foire du livre de Francfort, lorsque notre pays avait été invité d'honneur. Il avait profité de la sortie du livre Küsse und eilige Rosen pour inviter au salon plusieurs auteurs immigrés en Suisse. Ibrahim al-Kroni, un auteur libyen vivant en Suisse, avait été invité à s'exprimer lors de la cérémonie d'ouverture en tant que représentant de la "cinquième littérature" à côté d'auteurs écrivant dans les quatre langues nationales. Depuis, ce concept est utilisé de temps en temps (même sur notre site web, comme je viens de le remarquer!). Il ne nous semble cependant pas particulièrement bien choisi, car il englobe dans un seul groupe des auteurs d'origines et de langues extrêmement différentes. Un poète albanais et une autrice caraïbe qui écrit des textes autobiographiques ont relativement peu d'expériences communes sur le plan linguistique et littéraire.
En Suisse alémanique, des auteurs comme Catalin Dorian Florescu, Aglaja Veteranyi ou Yusuf Yesilöz ont permis à un large public de découvrir l'existence d'écrivains immigrés. Ces dernières années, un nombre grandissant de lectures, de discussions et même de séminaires universitaires ont été organisés autour du thème "littérature et immigration" et on fait référence à des auteurs vivant en Suisse. (Notez dans ce contexte que le 5 mai prochain, à 18h00, le festival de littérature de Bâle organise des lectures et une discussion avec Zsuzsanna Gahse (Hongrie/Suisse) et Dusan Simko (Slovaquie/Suisse) sur le thème " Über Sprachgrenzen hinaus. Schreiben, fremd sein in der Schweiz und schreiben in einer fremden Sprache " ("Au-delà des frontières linguistiques. Ecrire, être étranger en Suisse et écrire dans une langue étrangère"). L'association des autrices et auteurs suisses tient compte de la présence des auteurs immigrés dans notre pays, puisque l'un d'entre eux fait partie de son comité, Francesco Micieli, qui y succède à Dragica Rajcic. Pour le reste, l'association souhaite ne faire aucune différence entre les auteurs immigrés et indigènes. Cette attitude est juste. Accorder un traitement de faveur aux immigrés sous la forme d'un "bonus exotique" empêcherait un traitement équitable la production artistique. Le but est de défendre et soutenir équitablement la création littéraire de tous les auteurs travaillant en Suisse sur la base de la qualité des œuvres, ce que Feuxcroisés fait de façon exemplaire. Pour ma part, je fais partie des personnes qui organisent des contacts et établissent des liens. Ce travail est particulièrement important lorsque la langue, la culture de référence ou la personnalité de l'auteur ne sont pas d'accès facile.

Une deuxième question, plus personnelle: en quoi votre propre approche de ces écritures s'est-elle modifiée depuis cette époque?

La littérature des auteurs immigrés continue à beaucoup m'intéresser et je souhaiterais pouvoir y consacrer plus de temps à l'avenir. Cet intérêt a cependant toujours eu quelque chose de contradictoire: d'un côté, germaniste de formation, je suis une lectrice passionnée, douée d'un certain flair pour la langue et la qualité de l'écriture. D'un autre côté, j'ai toujours été très intéressée par la dimension sociale de la littérature. Je crois qu'une personne qui écrit pour essayer de venir à bout d'une situation extrême - et la migration et l'exil en font partie-en lui donnant un écho littéraire, doit être soutenue. C'est pourquoi les textes autobiographiques m'intéressent aussi.
On devrait cependant se garder d'avoir des attentes trop élevées et de croire qu'il y a beaucoup de nouvelles découvertes à faire à côté des auteurs déjà connus. Ce qui m'intéresse, c'est comment des personnes traduisent leur expérience d'immigration sous une forme artistique et donc littéraire, comment elle se situent entre ici et là-bas, et avec quelle langage elles essaient de rendre et de prendre en compte cette expérience.

Propos recueillis par Francesco Biamonte
Traduit de l'allemand par Yves Rosset

 

deutsch

Coordinarte dient als Knotenpunkt eines Netzwerkes, durch das zahlreiche ausländische, in der Schweiz lebende und arbeitende KünstlerInnen entdeckt und kontaktiert werden können. Wie ist dieses Projekt entstanden?

Das Netzwerk coordinarte ist Teil der Tätigkeit der Organisation "Kultur und Entwicklung", die vor rund zwanzig Jahren von verschiedenen Schweizer Hilfswerken als ihre gemeinsame Kulturstelle gegründet wurde. InitiantInnen waren Personen wie Annemarie Friedli und Al Imfeld, die sich seit langem für den kulturellen Reichtum Afrikas, Asiens und Lateinamerikas begeisterten. Die Hilfswerke wollten den Bildern von Hunger und Elend aus armen Ländern positive Aspekte gegenüberstellen, die nicht einfach Mitleid wecken, sondern Interesse und Respekt. Dies zu einer Zeit, als das Kulturschaffen dieser Kontinente in breiten Schichten zumindest der deutschsprachigen Schweiz kaum bekannt war und noch kaum Kulturschaffende aus Afrika, Asien und Lateinamerika in der Schweiz lebten. Unterstützt wurden damals Publikationen und Lesereisen; daneben wurden einzelne Künstler für Workshops eingeladen, um zum Beispiel ihr Wissen in traditioneller Webkunst weiterzugeben. Coordinarte existiert als Netzwerk mit breiter Präsenz im Internet seit etwa acht Jahren, dokumentiert und schafft Öffentlichkeit für KünstlerInnen, Veranstaltungen und zahlreiche weitere Informationen zu Kunst und Kultur aus dem Süden in der Schweiz.

Das Netzwerk coordinarte ist auf KünstlerInnen aus Asien, Lateinamerika und Afrika, sowie einigen KünstlerInnen aus den Ländern Süd-Ost Europas ausgerichtet und interessiert sich für diese Entwicklungsländer. Ist coordinarte auch an der multikulturellen Schweiz interessiert?

Aus obigen heraus wird klar, dass die Organisation "Kultur und Entwicklung" - und mit ihr das Netzwerk Coordiinarte - ihre Wurzeln in der Entwicklungszusammenarbeit hat. Im Übrigen wird sie bis heute massgeblich von der DDC mitgetragen. Im Verlauf der zwanzig Jahre haben sich die Schwerpunkte jedoch verschoben: hin zu KünstlerInnen, die in der Schweiz leben, und stärker auf die Kulturszene ausgerichtet. Die geografische Ausrichtung auf Afrika, Asien und Lateinamerika bleibt ein wichtiger Schwerpunkt, ist jedoch nicht strikt zu verstehen. Die Unterstützung der multikulturellen Schweiz ist ein wichtiges Anliegen; dass das Schwergewicht auf nicht-europäische Länder gelegt wird, lässt sich durchaus rechtfertigen, weil Klischees, Missverständnisse und Unwissen die Begegnung prägen. Die Künstler und ihr Schaffen können viel zu einer Öffnung und zu einer differenzierten, lockereren Wahrnehmung beitragen.
Coordinarte versucht auch Verbindungen zwischen der Romandie und der Deutschschweiz zu schaffen; die KünstlerInnen leben oft in zwei getrennten Welten, treten kaum in der anderen Sprachregion auf.
Coordinarte befindet sich im übrigen in einer grossen Umbruchphase; bis Ende 2007 könnte es im Tätigkeitsfeld weitere Veränderungen geben; die Trägerschaft wird auch nicht mehr von Hilfswerken bestimmt sein.

Wurde an eine Beteiligung dieser AutorInnen an der ch Reihe gedacht? (Die ch Reihe spielt eine entscheidende Rolle als Förderer von Übersetzungen literarischer Werke zwischen den nationalen Sprachen).

Wir sehen unsere Aufgabe darin, für Literatur in der Migration eine Öffentlichkeit herzustellen und für spezifische Fragen in diesem Zusammenhang zu sensibilisieren. So hat zum Beispiel die Diskussion um das Buch " Küsse und eilige Rosen " zur Folge gehabt, dass einzelne kantonale Förderstellen auch Manuskripte akzeptierten, die nicht in einer der vier Landessprachen geschrieben wurden. Inwieweit die ch Reihe eine solche Öffnung auch in Betracht ziehen würde, wäre zu prüfen.

Ist die Arbeit von coordinarte Ihrer Meinung nach durch die multikulturelle Tradition der Schweiz begünstigt? Wissen Sie, ob es ähnliche Projekte in anderen Ländern gibt und ob sie institutionelle Anerkennung genießen?

Möglicherweise liegt es neben der spezifischen Tradition von mehreren Kulturen daran, dass die Schweiz ein kleines Land ist, wo eine kleine Organisation wie unsere relativ vieles shcweizweit dokumentieren kann. Es gibt jedoch in verschiedenen europäischen Ländern Institutionen, die zumindest teilweise vergleichbar sind. Am nächsten steht uns "Kulturen in Bewegung " des VIDC in Österreich. Auch in Deutschland gibt es ähnliche Stellen, die jedoch segmentierter sind, auf einzelne Länder oder einzelne Sparten bezogen (wie etwa die " Gesellschaft zur Förderung der Literatur aus Afrika, Asien und Lateinamerika " in Frankfurt). In den Benelux-Ländern und in Skandinavien sind uns ebenfalls Institutionen bekannt, die aus der Entwicklungszusammenarbeit und/oder der Migrationsdiskussion herausgewachsen sind.

Wie denken Sie nimmt die Schweizer Kulturszene die von Ihnen vertretenen KünstlerInnen auf? (Sind schon Zusammenarbeiten zwischen schweizerischen und immigrierten KünstlerInnen durch coordinarte zustande gekommen?)

Oft werden Künstler aus Afrika, Asien und Lateinamerika mit bestimmten Erwartungshaltungen des Publikums konfrontiert. Man erwartet von ihnen das " Typische " : Ein Afrikaner soll trommeln und Märchen erzählen, ein Argentinier Tango spielen und eine Araberin über das Kopftuch schreiben etc. Jeder Künstler sucht eigene Wege mit diesen Erwartungshaltungen umzugehen : Er passt sich ihnen an und setzt ganz auch das Exotische seiner Herkunft, durchbricht sie, spielt mit ihnen, kehrt sie um oder ignoriert sie.
Je länger Künstler in der Schweiz leben, desto öfter ergeben sich natürlich Kollaborationen mit Schweizer Künstlern. Selbstverständlich begrüssen wir solche Projekte, ohne sie zu idealisieren oder erzwingen zu wollen. Eine solche Zusammenarbeit ist nicht per se schon qualitativ überzeugend, sondern braucht oft einen langen Schnauf und eine grosse Bereitschaft von beiden Seiten, einander zuzuhören. Der Südkulturfonds legt im übrigen viel Wert darauf, dass die Künstler aus Afrika, Asien und Lateinamerika in einem solchen Projekt eine tragende Rolle haben. Es kommt gerade bei musikalischen Projekten imme wieder vor, dass (mittelmässige) Schweizer sich mit (oft hochkarätigen) " exotischen " Musikern schmücken. Von wirklicher künstlerischer Auseinandersetzung und Begegnung kann dabei nicht die Rede sein.

Durch coordinarte kann man zahlreiche Musiker -was nicht erstaunlich ist- und auch bildende Künstler finden. Im Bereich der Literatur wird die Sprachproblematik komplizierter (außer für einige afrikanische Schriftsteller, die auf Französisch schreiben). Wie gehen Sie und die betroffenen AutorInnen mit dieser Problematik um?

Den Autoren, die nicht in einer der Schweizer Landessprachen schreiben, fehlt oft die breite Öffentlichkeit. Ihre Öffentlichkeit befindet sich vielleicht im Herkunftsland oder im engen Rahmen der Kulturvereine hier. Hier einen Verlag zu finden, ist auch für Schweizer Autoren nicht einfach, für fremdsprachige Veröffentlichungen und erst recht für noch nicht publizierte Manuskripte fast unmöglich.
Öffentlichkeit schaffen ist unser Anliegen, aber die Möglichkeiten sind begrenzt. Für Lesungen in kleinerem Rahmen in der Deutschschweiz ist es z.B. wichtig, dass Texte auf deutsch vorliegen und mit dem Autor auf deutsch kommuniziert werden kann. Es gibt nicht viele Autoren, die diese Voraussetzung zutrifft. Die Förderung von Übersetzungen ist zentral. Der von Kultur und Entwicklung im Auftrag der DDC und der Pro Helvetia verwaltete Südkulturfonds kann nur vereinzelt zweisprachige Publikationen unterstützen, die einem Autor Zugang zur Schweizer Leserschaft ermöglichen.

Wie entdecken Sie die in der Schweiz immigrierten AutorInnen? Inwiefern kommen diese zu Ihnen und inwiefern suchen Sie sie auf?

Es gibt immer wieder AutorInnen, die sich mit uns in Verbindung setzen und uns ihre Manuskripte zusenden. Grundsätzlich bin ich einfach neugierig: Durch die langjährige Arbeit in diesem Bereich, früher auch als Literaturjournalistin, bin ich hellhörig auf neue Namen und gehe diesen nach. Wir möchten die AutorInnen dokumentieren; qualitativ herausragende Entdeckungen sind dabei nicht allzu häufig.

Eine qualitative Einschätzung ist wahrscheinlich aus sprachlichen Gründen in den meisten Fällen praktisch unmöglich. Wie gehen Sie mit dieser Schwierigkeit um?

Wir versuchen Fachpersonen beizuziehen und möglichst verschiedene Meinungen von LeserInnen einzuholen. Glücklicherweise ist es als Dokumentationsstelle nicht notwendig, es eindeutiges Urteil zu einem Werk zu haben. Eine gewisse Einschätzung ist jedoch möglich.

Bei den Menschen, die ihr Land aus politischen Gründen verlassen haben, kann man sich vorstellen, dass sie nur ihre Arbeit fortsetzen möchten. Vorstellbar ist aber auch, dass es ihnen darum geht, dem Schweizer Publikum eine Art Erlebniserfahrung zu schildern. (Zum Beispiel Yusuf Yesilöz mit seinem auf Deutsch geschriebenen Buch Reise in die Abenddämmerung.) Vielleicht geht es auch darum, das Publikum in ihren Herkunftsländern weiter zu erreichen, ohne sich in Gefahr zu begeben. Welche Varianten sind erfahrungsgemäß die häufigsten?

Man muss unterscheiden zwischen denjenigen, die bereits in ihrem Herkunftsland literarisch tätig waren und denjenigen, die im oder durch das Exil zum Schreiben kamen. Für erstere - dies trifft etwa auf viele der Lyriker aus dem Kosovo zu, die in der Deutschschweiz leben - ist das Weiterarbeiten wichtig und ihr Bezugsrahmen bleibt sehr oft das Herkunftsland und die Diaspora. Für andere hat die Extremsituation Flucht und Exil das Schreiben erst notwendig oder möglich gemacht, sei es zur Aufarbeitung traumatischer Erfahrungen oder zur Sicherung der eigenen Identität in der Fremde. Ihr Schreiben ist direkt mit der Migration verbunden und richtet sich deshalb oft auch an ein schweizerisches Publikum. (Welcher " cas " häufiger ist, ist etwas schwierig zu sagen. Unter den gestandenen Autoren sicher der erste Fall)

1998 haben Sie zusammen mit Christine Tesch und Anita Müller das Lesebuch Küsse und eilige Rosen. Die fremdsprachige Literatur der Schweiz herausgebracht. Es war die erste Anthologie schweizerischer Immigrationsliteratur, die ich gelesen habe und wahrscheinlich ist es die erste, die es überhaupt gibt. Sie hat mich sehr beeindruckt. Es war wie eine unerwartete Tür, die sich öffnete, und dahinter gab es eine komplexe Realität, sowohl sozial als auch literarisch, die das Lesebuch aber nur suggerieren konnte. Das Lesebuch hat für die Anerkennung einer sogenannten "fünften Literatur der Schweiz " eine entscheidende Rolle gespielt, obwohl eine solche Bezeichnung strittig und auch nicht besonders gelungen ist; anders die Bezeichnung, welche Sie als Untertitel des Lesebuches gewählt haben. Als die Anthologie erschienen ist, war der Begriff der "fünften Literatur der Schweiz " ganz neu, für mich zumindest. Dazu eine erste, sehr allgemeine Frage: wie ist dieser Begriff entstanden und wie hat er sich entwickelt? Wie wurde er in der Fachwelt aufgenommen? Und wie die "fünfte Literatur"?

Der Begriff " fünfte Literatur der Schweiz " wurde damals meines Wissens (ich habe mich heute noch mit Ch. Tresch unterhalten, die das ähnlich in Erinnerung hat) von Christoph Vitali geprägt, dem Leiter des Schweizer Auftritts als Schwerpunktland an der Frankfurter Buchmesse. Er hatte das Buch " Küsse und eilige Rosen " zum Anlass genommen, verschiedene in die Schweiz migrierte Autoren an die Messe einzuladen. Als Eröffnungsredner lud er neben Autoren der vier Landessprachen den in der Schweiz lebenden libyschen Autor Ibrahim al-Koni ein, sozusagen als Vertreter der " fünften Literatur ". Der Begriff wird seither immer mal wieder verwendet (sogar auf unserer Webseite, wie ich feststellen musste !) ; er scheint uns nicht sehr glücklich gewählt , weil AutorInnen der unterschiedlichsten Herkunftsländer und Sprachen als geschlossene Gruppe dargestellt werden. Ein albanischer Lyriker und eine karibische Autorin autobiografischer Texte haben relativ wenige Erfahrungen auf sprachlicher und literarischer Ebene gemeinsam.

In der Deutschschweiz haben AutorInnen wie Catalin Dorian Florescu, Aglaja Veteranyi oder Yusuf Yesilöz die Existenz eingewanderter AutorInnen für eine breitere Öffentlichkeit sichtbar gemacht. Es gibt in den letzten Jahren vermehrt Lesungen und Gesprächsrunden (siehe z. B. Literaturfestival Basel 5. Mai, 18.00 : " Über Sprachgrenzen hinaus. Schreiben, fremd sein in der Schweiz und schreiben in einer fremden Sprache " ; Lesungen und Diskussion mit Zsuzsanna Gahse (Ungarn/Schweiz) und Dusan Simko (Slowakei/Schweiz)), ja auch universitäre Angebote zum Thema " Literatur und Migration ", die sich auf Autoren in der Schweiz beziehen. Der Schriftstellerverband trägt den eingewanderten Autoren insofern Rechnung, als dass im Vorstand ein eingewanderter Autor Einsitz hat ; nach Dragica Rajcic ist das neu Francesco Micieli. Der Verband möchte aber ansonsten keine Unterschiede zwischen eingewanderten und eingesessenen Autoren machen - insofern zu recht, als die Sonderbehandlung als Migrierter, die Anwendung einer Art " Exotenbonus ", der künstlerischen Leistung nicht gerecht wird. Das Ziel muss eine gleichberechtigte Wahrnehmung und Unterstützung des literarischen Schaffens aller in der Schweiz tätigen AutorInnen sein, die sich an der Qualität des Werkes orientiert - so wie es Feuxcroisés auf vorbildliche Weise tut. Auf dem Weg zu diesem Ziel sehe ich mich als eine von denen, die Teilchen beifügt, Kontakte vermittelt, Knoten knüpft. Diese sind vor allem da wichtig, wo eine Sprache, ein kultureller Hintergrund oder auch eine einzelne Persönlichkeit nicht leicht zugänglich sind.

Eine zweite, eine persönlichere Frage: wie hat sich Ihre Beschäftigung mit diesen Schriften seither verändert?

Die Beschäftigung mit der Literatur eingewanderter AutorInnen ist für mich immer noch ein spannendes Thema, dem ich in Zukunft eigentlich gerne mehr Zeit widmen möchte. Ich war jedoch immer etwas widersprüchlich in meinem Interesse: Auf der einen Seite bin ich eine begeisterte Leserin und ausgebildete Germanistin mit einem gewissen Gespür für Sprache und Qualität. Auf der anderen Seite interessierte mich immer auch die soziale Ebene der literarischen Tätigkeit. Wer z. B. eine Extremsituation - zu der man die Migration, das Exil zählen kann - schreibend, literarisch zu bewältigen sucht, sollte dabei unterstützt werden. Dabei interessieren mich auch autobiografische Texte.
Man sollte jedoch nicht zu grosse Erwartungen haben und glauben, es wären abgesehen von den bereits bekannten Autoren viele Neuentdeckungen zu machen. Mich interessiert grundsätzlich, wie Menschen ihre Migrationserfahrung künstlerisch und eben literarisch umsetzen, wie sie sich orten zwischen dem Dort und dem Hier und mit welcher Sprache sie dieser spezifischen Erfahrung gerecht zu werden versuchen.

Propos recueillis par Francesco Biamonte
Traduit de l'allemand par Yves Rosset