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Un événement autour de Gustave Roud

Un événement - Gustave Roud, poète du XXe siècle
Sommaire complet du numéro d'Europe consacré à Gustave Roud - Correspondance Roud-Jaccottet -
Un extrait de Requiem - Oeuvres de Gustave Roud

  Deux extraits de la revue Europe d'octobre 2002

Un événement

Dans La Nouvelle Revue française, Jacques Chessex écrivait en mars 1968, annonçant l’imminente parution du petit volume Gustave Roud chez l’éditeur Pierre Seghers:

“ S’il y a une injustice à réparer sans tarder, c’est bien celle-ci, assez scandaleuse il me semble, qui prive Gustave Roud de l’audience française et de la place exacte à laquelle il a naturellement droit. […]

Supervielle, Paulhan, Arland, Bounoure ont lu Gustave Roud, ont reconnu sa solitaire grandeur. Philippe Jaccottet publiera prochainement un Gustave Roud qui deviendra sans doute, très tôt, l’indispensable commentaire du poète. Considéré comme un maître par les écrivains et par les critiques de son pays, Roud va-t-il connaître un plus large cercle de lecteurs à Paris, en Belgique, au Canada ? C’est le vœu particulièrement vif qu’expriment les amis d’un poète que son intransigeante discrétion a trop longtemps dissimulé."

Ce vœu trouve aujourd’hui une forme de réalisation. Parallèlement à la sortie, dans “ Les Cahiers de la nrf ” chez Gallimard, de sa correspondance échangée avec Philippe Jaccottet, Roud entre dans la collection de poche “ Poésie/Gallimard ”, rejoignant les poètes consacrés du XXe siècle et les grandes voix germaniques qu’il a lui-même traduites : Hölderlin, Novalis, Trakl. Des rééditions: celle très attendue du Gustave Roud par Jaccottet chez Seghers, chez Fata Morgana des proses (Halte en juin) et des traductions de Novalis, à la Bibliothèque des Arts des traductions de Hölderlin, et la présente livraison de la revue Europe s’associent aujourd’hui pour donner à cette œuvre, en France, la place qui lui revient.

José-Flore Tappy
Extrait de la revue Europe, octobre 2002

Gustave Roud, poète du XXe siècle

A l'heure où l'oeuvre de Gustave Roud (1897-1976) fait son entrée dans une collection de poche consacrée à la poésie universelle 1, il paraît légitime de chercher à situer le poète vaudois dans le XXe siècle, parmi ses pairs. A l'exception de quelques textes et traductions parus dans des revues françaises, tous les recueils de Roud, de 1927 à 1972, ont été publiés chez des éditeurs de Suisse romande. Ses amis suisses les plus attentifs à son oeuvre ont entrepris, à partir des années 60 surtout, d'élargir l'audience du poète en France. On constate cependant en Suisse romande une sorte de réserve, ou une surestimation de la modestie, qui ont élevé la discrétion de Roud au rang de vertu et de destin. Une certaine obscurité, au plan éditorial, paraissait convenir à cette oeuvre.

[…]

Cette insistance, en Suisse romande, sur la ténuité de l'oeuvre roudienne, sur son retrait des circuits de grande diffusion, apparaît comme l'envers de la ferveur et de l'amitié - peut-être un peu farouches - qui lui ont été vouées. Pour les écrivains romands qui l'ont connu et fréquenté, dans leur jeunesse le plus souvent, Roud a représenté l'image parfaite du poète dont la vie tout entière était consacrée à sa vocation. L'accueil qu'il leur réservait, chez lui à Carrouge aussi bien que dans ses lettres, contribua à nourrir l'admiration et l'amitié que lui témoignèrent Maurice Chappaz, Jacques Chessex, Philippe Jaccottet, Anne Perrier, Pierre-Alain Tâche, Alexandre Voisard, pour n'en citer que quelques-uns.

L'oeuvre de Gustave Roud va toucher dès cette année un plus large et plus lointain public: c'est qu'elle n'était donc pas destinée à rester méconnue. Rappelons aussi qu'elle n'est pas aussi mince ni concentrée qu'on l'a dit. Aux trois tomes des Ecrits, il convient en effet d'ajouter les nombeux textes publiés en revues le volumineux Journal, les traductions, ainsi que la très riche correspondance. On n'oubliera pas non plus les photographies de Gustave Roud, qui ont fait l'objet d'une exposition au Musée de l'Elysée à Lausanne et au Centre Pompidou à Paris (1989-1990).

1 « Essai pour un paradis » et autres textes, Poésie/Gallimard, 2002

Claire Jaquier
Prof. Univ. Neuchâtel et Présidente de l’Association des Amis de Gustave Roud
Extrait de la revue Europe, octobre 2002

 

  Sommaire revue Europe


Sommaire complet du numéro d'Europe consacré à Gustave Roud

 

 

  Correspondance Gustave Roud-Philippe Jaccottet


Philippe Jaccottet - Gustave Roud, Correspondance, 1942-1976
(Paris, Gallimard, « Les Cahiers de la nrf », 2002).

Philippe Jaccottet n'a que dix-sept ans lorsqu'il rencontre pour la première fois Gustave Roud. Il trouve en cet homme qui pourrait être son père une écoute d’exception, toujours disponible, généreuse, impatiente d’échanges et remplie de gratitude pour leur amitié naissante. Cette rencontre aura pour Jaccottet une portée décisive.

Dès le départ, Roud fait figure de maître : il conduit, rassure, conseille son jeune ami. Jaccottet lutte contre le découragement et la difficulté d'être ; cherche une place, une voix, entre morosité et nihilisme, ardeur et accablement. Lorsqu’il s’essaie à écrire, il hésite entre l’écriture dramatique, le poème en vers et la prose. Roud l'aide à trouver confiance, à se comprendre dans ce qu'il a de meilleur.

En homme de métier et de maturité, Roud ouvre ainsi au jeune Jaccottet, de la manière la plus naturelle, les portes de son univers. Mais pour Jaccottet, au-delà de ces précieux échanges, Roud est avant tout un poète dont l’œuvre le bouleverse. Non pas celui qui sait et qui professe : mais un poète qui doute, qui écoute et qui cherche; infatigable marcheur sur des routes infinies, le plus souvent nocturne et solitaire, frère du Rimbaud des Illuminations; un poète de l’errance, mais une errance obscure, aux frontières du jour et de la nuit, en quête d’une transcendance perdue dont seules quelques intuitions fulgurantes seraient garantes; poète de la séparation, et du questionnement.

José-Flore Tappy

Edition établie et annotée par José-Flore Tappy, collaboratrice du Centre de recherches sur les lettres romandes de l’Université de Lausanne qui travaille à l’édition de textes à partir d’archives littéraires inédites. C’est dans ce cadre qu’elle a publié la correspondance d’Ernest Bloch et de Romain Rolland, établi l’édition des Œuvres complètes de Catherine Colomb, et publié dans les « Cahiers de la nrf » la correspondance de Jean Paulhan et Monique Saint-Hélier.

 

  Un extrait de Requiem

« Entre les roses noircies et ces traînées de bave orange hier encore capucines, un aster tend ses rameaux de fleurs fripées, tremble silencieusement, supplie ! Détresse pour détresse, il n’est pas d’abîme entre celle des plantes et celle des hommes. L’absolu d’une solitude les rapproche jusqu’à l’échange : j’ai vécu cette mutuelle pitié. C’est pourquoi j’entends l’appel à peine balbutié là-bas dans la bise. J’irai toucher les minces tiges mordues par le gel, je les caresserai comme elles avaient frôlé jadis l’épaule du rôdeur jeté dans un vertige de néant contre leur touffe moribonde. »

« J’obéis. Je retourne au pied du frêne d’autrefois. Je salue le large fût, la couronne de feuilles légères et de mésanges. Une fois encore, je caresse doucement l’écorce aux profondes gerçures, toute tigrée de mousse et de lichens. Et j’épie en vain pendant des heures sur la colonne qui se veut plus insensible que la mort l’apparition miséricordieuse d’un signe, d’un souvenir, du reflet d’un reflet, une touche de soleil un peu trop vive, la tache d’or que l’ombre n’abolirait plus. »

Extrait de : Gustave Roud : Requiem (1967)

 

  Oeuvres de Gustave Roud

ÉCRITS I, II, III ( Bibliothèque des Arts).
AIR DE LA SOLITUDE ET AUTRES TEXTES (Poésie/Gallimard).
TROIS POÈMES ANCIENS (Fata Morgana).
HAUT-JORAT ( Payot).
JOURNAL (Bertil Galland).
LES FLEURS ET LES SAISONS, avec des photographies de l’auteur
(La Dogana).
HALTE EN JUIN (Fata Morgana).
LECTURES (L’Aire).
SALUT À QUELQUES PEINTRES (Bibliothèque des Arts).

Traductions

Poèmes de Hölderlin (Mermod; nouvelle édition Bibliothèque des Arts).
Rilke, Lettres à un jeune poëte, précédées d’Orphée et suivies de deux essais sur la poésie(Mermod).
Novalis, Les Disciples à Saïs, Hymnes à la nuit, Journal (Mermod; rééd. Bibliothèque des Arts et Fata Morgana).
Georg Trakl, Vingt-quatre poèmes (La Délirante).


Page créée le 01.08.98
Dernière mise à jour le 09.09.03

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