| Comment sont nées les Editions 
                      Empreintes ? François 
                      Rossel - Les Editions Empreintes sont nées 
                      à partir de mon expérience d'enseignant. J'ai 
                      commencé ma carrière dans une classe où 
                      il y avait du matériel typographique ; les enfants 
                      étaient déjà tout à fait au 
                      clair sur la manière de composer un texte, et de 
                      l'imprimer. Il y avait là tout l'aspect " fabrication 
                      du livre " : ce sont les enfants qui, dans ce cas, 
                      ont enseigné à leur enseignant. Ensuite, de 
                      fil en aiguille, j'ai rencontré l'imprimeur qui avait 
                      fourni le matériel. C'était la fin de l'époque 
                      où la typographie se réalisait avec des caractères 
                      en plomb. L'imprimeur en question voulait se débarrasser 
                      de son matériel. Il nous a alors proposé une 
                      presse à épreuve de 800 kg - plus une tonne 
                      de caractères en plomb. Déjà, la lettre 
                      me fascinait, la poésie aussi
 Ayant hérité 
                      de tous ces outils, je me suis dit qu'il ne restait plus 
                      qu'à imprimer des livres. J'ai rencontré Alain 
                      Rochat et nous avons fondé rapidement cette maison 
                      d'édition à partir de manuscrits de personnes 
                      que nous connaissions personnellement. Ensuite, une rencontre 
                      avec Maurice Chappaz a été décisive; 
                      il a souhaité publier des livres chez nous. Nous 
                      nous sommes ainsi fait connaître des libraires, des 
                      auteurs et des poètes de Suisse romande. En gros, 
                      le noyau de départ des éditions Empreintes 
                      était dès lors constitué. Pourquoi ce choix de n'éditer 
                      que de la poésie? François 
                      Rossel - Personnellement, c'est un genre littéraire 
                      qui m'a toujours fasciné. Depuis l'adolescence, je 
                      n'ai que peu de goût pour les histoires. Mais j'avais 
                      très jeune une prédilection pour des textes 
                      courts qui pouvaient, en une seule page ou en plusieurs, 
                      donner à penser, donner à sentir et donner 
                      à voir. C'est probablement le fait que la poésie 
                      soit faite de textes courts, incisifs, qui m'a donné 
                      le goût pour cette forme.Alain Rochat - On 
                      peut ajouter aussi que François Rossel et moi-même 
                      écrivions déjà de la poésie 
                      en 1984, quand les éditions Empreintes ont été 
                      créées. Le goût pour la poésie 
                      préexistait donc à la création des 
                      éditions.
 Ce choix existait-il dès 
                      le départ, ou s'est-il dessiné peu à 
                      peu ? Alain 
                      Rochat - Non, nous avons tout de suite décidé 
                      de ne nous occuper que de poésie. Puis nous avons 
                      fait quelques entorses à ce principe. Nous avons 
                      publié un roman de Vincent Philippe, un bon roman 
                      et qui a bien marché. Nous avons publié des 
                      recueils de nouvelles de Corinna Bille et une réédition 
                      de Théoda. Mais la volonté de ne se 
                      consacrer qu'à la poésie et d'abord, dans 
                      un premier temps, à la poésie de Suisse romande, 
                      était là dès le départ.François Rossel 
                      - Ce goût pour la poésie et était aussi 
                      un goût pour la lettre, la mise en page, pour ce qu'on 
                      appelle les beaux livres. Ce qui a été aussi 
                      tout à fait déterminant pour moi, c'est le 
                      fait de d'avoir rencontré Alain Rochat très 
                      peu de temps après avoir décidé de 
                      fonder les éditions Empreintes. Parce qu'il partageait 
                      vraiment les mêmes valeurs que moi sue ce plan. Cela 
                      a été tout de suite quelque chose d'important 
                      d'être deux.
 Parlez-nous de cette fameuse rencontre 
                      avec Maurice Chappaz, déterminante pour le destin 
                      de votre maison
 François 
                      Rossel - La rencontre avec Chappaz a été 
                      assez curieuse : j'étais un grand admirateur de la 
                      collection grise de l'édition Bertil Galland dans 
                      laquelle j'avais découvert adolescent Voisard, Chappaz 
                      et tant d'autres. Un jour, je me suis trouvé ne présence 
                      de Chappaz lors d'une rencontre publique (il recevait un 
                      prix, et je recevais également un prix de poésie). 
                      Je ne savais pas trop comment l'aborder. Je lui ai juste 
                      dit qu'il avait une jolie casquette. Et du coup, je ne sais 
                      pas comment les choses se sont passées, on s'est 
                      pris d'amitié
 Parfois, les rencontres sont 
                      un peu magiques... il nous a d'emblée proposé 
                      deux de ses manuscrits, à notre grande surprise. 
                      J'ai toujours été fasciné par ce monsieur 
                      que j'ai essayé d'apprendre à imiter. Il y 
                      a un côté, pour moi, presque paternel là-dedans. 
                      Au fond, quelque chose se matérialisait. Je l'avais 
                      beaucoup lu, je l'avais beaucoup estimé, j'avais 
                      dit ses poèmes à haute voix. Le jour où 
                      je l'ai rencontré, j'étais très ému, 
                      mais quelque chose se matérialisait. Alain Rochat - Par 
                      l'intermédiaire ou à l'exemple de Maurice 
                      Chappaz, nous avons eu la chance de rencontrer bon nombre 
                      de ces auteurs de la Collection Grise et des éditions 
                      Bertil Galland. On admirait ces auteurs, c'était 
                      comme un rêve de les rencontrer, de pouvoir travailler 
                      avec eux. D'être considéré, aussi. Je 
                      pense à Alexandre Voisard par exemple. La rencontre 
                      avec Maurice Chappaz nous a aussi ouvert les portes des 
                      librairies - puisque, dès lors, nous avions quand 
                      même des livres qui se vendaient bien. De fil en aiguille, 
                      cela a aussi attiré d'autres auteurs : Anne Perrier, 
                      François Debluë etc. Nous avons pu éditer 
                      13 livres de Maurice Chappaz et 8 de Corinna Bille, sur 
                      124 titres, en vingt ans. Une longue et belle aventure ! 
                      Nous avons un peu appris notre métier - peut-être 
                      même beaucoup - avec Maurice Chappaz.
 Comment s'est fait le passage 
                      entre cette lignée de patriarches et les plus jeunes 
                      poètes, que vous avez édités de plus 
                      en plus? François 
                      Rossel - Pour ma part, j'ai eu beaucoup plus de peine 
                      à me départir de ces poètes que j'admirais 
                      beaucoup. J'avais plus de peine qu'Alain. Alain a assez 
                      rapidement estimé qu'il fallait aussi publier de 
                      jeunes poètes - sans pour autant renier les pères, 
                      les mères ou les grand-pères, les grand-mères
Alain Rochat - A vrai 
                      dire, les tout premiers auteurs édités par 
                      Empreintes étaient des gens de notre âge. Je 
                      faisais mes études de lettres à l'époque, 
                      nous avons donc édité des amis, des copains. 
                      En 1986, après la rencontre avec Maurice Chappaz, 
                      nous avons publié les patriarches que nous évoquions 
                      à l'instant - tout en continuant à éditer 
                      des gens de notre génération. La génération 
                      intermédiaire, disons les auteurs nés aux 
                      alentours de 1950, est venue peut-être dans un troisième 
                      temps ; tout cela s'est fait sans plan préconçu, 
                      ni volonté particulière d'être plutôt 
                      l'éditeur de telle génération ou telle 
                      autre. Ce qui me fait grand plaisir, c'est que l'auteur 
                      le plus âgé que nous ayons éditéest 
                      Jean-Georges Lossier, hélas disparu, qui était 
                      né en 1911. L'auteure la plus jeune, Caroline Schumacher 
                      (Prix de poésie C.F. Ramuz l'année passée), 
                      est née en 1977. Je tiens beaucoup à cette 
                      ouverture, à cette palette. Il est vrai qu'il y aurait 
                      deux tentations : d'une part de ne pas éditer des 
                      poètes trop " vieux " et déjà 
                      bien servis - ce qui serait une forme de racisme ridicule 
                      ; d'autre part de ne pas éditer de jeunes parce que 
                      les risques sont trop grands. Nous voulons plutôt 
                      essayer de garder une palette large. Le problème, 
                      c'est qu'il n'est pas non plus possible d'éditer 
                      tout le monde et de prendre tous les titres qu'on nous propose. 
                      Des choix doivent se faire, de manière un peu cruelle 
                      parfois. Mais je me réjouis aussi, par exemple, d'éditer 
                      le premier recueil de Raphaël Urweider, traduit en 
                      français, un auteur né en 1974. Je pense que 
                      c'est assez difficile pour des éditeurs de maintenir 
                      un regard sur les plus jeunes. Parce qu'on n'est pas dans 
                      les mêmes circuits. On n'a pas les mêmes références, 
                      peut-être pas la même culture. Nous ne savons 
                      donc pas très bien où ils sont, ce qu'ils 
                      font, quelles revues lire pour se tenir au courant de leur 
                      travail
 Comment vous parviennent les manuscrits? 
                      En recevez-vous beaucoup, ou cela se passe-t-il toujours 
                      par connaissance directe? François 
                      Rossel - Nous publions en fn de compte très 
                      peu de manuscrits arrivés par la poste. Par exemple, 
                      Jean-Georges Lossier, dont on parlait tout à l'heure, 
                      nous a été recommandé par François 
                      Debluë. C'est vrai que ça fait un peu, peut-être, 
                      "famille" ; mais la Suisse romande est petite 
                      ; et les poètes sont curieux de voir ce qui se fait 
                      autour d'eux : ils nous aident aussi à élargir 
                      le spectre de nos intérêts.  Est-ce que le monde de l'édition 
                      et de la distribution ont subi des changements notables, 
                      au cours de ces vingt années? Alain 
                      Rochat - Je vais prendre les choses par le petit 
                      bout de la lorgnette. Une chose qui me frappe en vingt ans, 
                      c'est que, malgré les difficultés des collectivités 
                      publiques, des décideurs se retrouvent toujours à 
                      soutenir les éditions Empreintes en répondant 
                      favorablement à nos demandes d'aide à l'édition. 
                      Il est bien évident que les éditions Empreintes 
                      ne pourraient pas exister sans ces aides. Elles ne pourraient 
                      pas exister si François Rossel et moi n'étions 
                      pas bénévoles. Donc il y a une réelle 
                      volonté de soutien, aujourd'hui encore. Je tiens 
                      à le dire, parce que parfois certains se mettent 
                      à en douter, déplorant l'état de la 
                      culture ou la manière dont les collectivités 
                      publiques s'en occupent. Quant à l'évolution 
                      de l'édition de poésie et de la poésie 
                      : je pense que les changements sont plus généraux, 
                      et concernent l'ensemble du monde du livre et de la librairie. 
                      J'ai le sentiment que c'est quand même plus difficile 
                      aujourd'hui de vendre des livres de poèmes que ça 
                      ne l'était dans les années '90. Toute une 
                      part de public reste à convaincre, qui serait susceptible 
                      de faire le pas, d'acheter un livre de poésie et 
                      de se mettre à lire de la poésie. Mais j'ai 
                      le sentiment que ces gens-là sont devenus difficiles 
                      à atteindre. Soit parce que l'information est de 
                      plus en plus rapide, de plus en plus compliquée, 
                      soit parce que la situation économique fait que les 
                      gens n'ont plus forcément les moyens d'acheter un 
                      livre de poésie juste parce qu'ils sont attirés 
                      par la couverture. Ces vingt ans vous permettent-ils 
                      de dessiner une évolution dans la poésie suisse 
                      de langue française ? Est-ce que vous pouvez constater 
                      des changements, un foisonnement de la poésie romande 
                      ou alors au contraire son repli ?  Alain 
                      Rochat - Je saurais difficilement répondre 
                      à cette question. Si on regarde le type de poésie 
                      que publient les Editions Empreintes, on pourrait dire - 
                      pour simplifier - qu'on est plutôt du côté 
                      du pôle lyrique que du pôle textualiste. En 
                      ce sens, je pense qu'il y a des écoles qui se sont 
                      essoufflées. En France, il me semble que tout le 
                      courant qui était né de la revue " Tel 
                      Quel " est aujourd'hui nettement épuisé. 
                      Il se trouve qu'Empreintes n'a jamais été 
                      de ce côté-là. On a toujours été 
                      pour le lyrique. J'ai l'impression que certains textes de 
                      jeunes personnes que j'ai pu lire ont peut-être tiré 
                      le meilleur de ce courant de la poésie qui aime les 
                      jeux de langues, qui est très consciente de ce qu'est 
                      la fabrication littéraire, de ce qu'est la fiction 
                      littéraire et la fiction du jeu poétique, 
                      qu'ils réussissent peut-être à donner 
                      quelque chose d'intéressant dans une voie médiane. 
                      C'est assez frappant, en France notamment. En Suisse romande, 
                      c'est un peu différent car on a été, 
                      je crois, assez à l'écart de ces courants. 
                      Le surréalisme n'a par exemple eu quasiment aucune 
                      influence en Suisse romande, de même que nouveau roman. 
                      On était ici en position d'observateur. Je ne vois 
                      donc pas d'évolution notable. Mais il est vrai qu'il 
                      y a beaucoup de poésie que nous ne connaissons pas, 
                      ou mal; des gens que nous fréquentons peu, notamment 
                      dans le courant de la poésie sonore. Par provocation, 
                      j'avais dit une fois à quelqu'un que la vraie poésie 
                      contemporaine, c'était peut-être le rap. C'était 
                      une provocation, une plaisanterie : mais je suis certain 
                      qu'il y a aussi quelque chose d'intéressant là 
                      derrière. Il y aurait aussi et peut-être une 
                      évolution heureuse : une espèce de retour 
                      à l'oralité.François Rossel 
                      - C'est quelque chose qui a changé pour nous aussi. 
                      Au début, quand je recevais des manuscrits, je les 
                      lisais en silence. Maintenant, je le fais à voix 
                      haute. Mis à part cela, j'ai un peu de peine à 
                      dire ce qui aurait changé en vingt ans. En tout cas, 
                      je peux dire que les Editions Empreintes ont changé 
                      en vingt ans. Ne serait-ce que pour dans la manière 
                      de faire les livres : avant, nous fabriquions les livres 
                      avec des plombs. Cela a bien changé. Et il y a aussi 
                      eu une certaine ouverture, notamment à travers de 
                      la collection "Poche-poésie", qui était 
                      une idée d'Alain Rochat, et qui nous permet désormais, 
                      grâce au soutien de Pro Helvetia, de nous ouvrir à 
                      d'autres courants littéraires, d'autres régions 
                      linguistiques . C'est une collection à laquelle nous 
                      tenons beaucoup.
 Comment est née la collection 
                      Poche-Poésie, qui se caractérise par deux 
                      aspects: le format de poche et la traduction de poètes 
                      d'autres régions de la Suisse - et ce à un 
                      rythme très régulier, deux livres par année, 
                      deux traductions tous les deux ans? Alain 
                      Rochat - La collection existe depuis 10 ans et le 
                      vingtième volume va sortir. Au cours d'une année, 
                      deux volumes consacré à des auteurs francophones 
                      paraissent, et l'année suivante, ce sont deux auteurs 
                      des autres aires linguistiques du pays: un Alémanique 
                      et un Tessinois (j'aimerais bien un jour faire un Poche-Poésie 
                      d'un poète romanche). Le principe de la collection 
                      Poche-Poésie est de rééditer des textes. 
                      Notre première idée n'était pas d'inclure 
                      dans cette collection des auteurs alémaniques et 
                      tessinois, mais Pro Helvetia nous l'a demandé. On 
                      s'est dit : " c'est intéressant pourquoi pas 
                      ? " Mais on n'y connaissait rien du tout, ni François 
                      ni moi ne maîtrisons suffisamment l'allemand et l'italien 
                      pour être compétents dans le domaine. Il a 
                      donc fallu s'entourer d'autres gens, d'autres compétences 
                      : c'était un aspect intéressant, parfois périlleux, 
                      mais nouveau pour nous. Cela a été la première 
                      brèche dans notre étiquette "éditeur 
                      de poésie romande". Ensuite, au moment de la 
                      parution du centième livre d'Empreintes en 2001, 
                      nous avons décidé d'abandonner toute étiquette 
                      - à la fois linguistique et géographique : 
                      à côté de ce centième livre, 
                      nous avons publié un auteur luxembourgeois et un 
                      auteur français. Puis une traduction d'un conte de 
                      Pouchkine, et un livre d'un poète irakien qui vit 
                      à Londres. Dorénavant nous n'avons plus d'étiquette 
                      particulière : il est évident que notre attention 
                      reste tournée vers les poètes de Suisse romande. 
                      Mais pas seulement. La publication du "Journal" 
                      de Roud a aussi ouvert une nouvelle brèche (notre 
                      volonté était, jusque-là, d'éditer 
                      des auteurs vivants). Avec Gustave Roud, et une édition 
                      critique, établie par des universitaires, nous avons 
                      ouvret une nouvelle porte, celle de la réédition 
                      des grands classiques de la littérature romande. Dans la collection " Poche-Poésie 
                      " le format aussi a changé : des livres plus 
                      carrés, avec une couverture plastifiée, un 
                      papier clair et léger. Pourquoi ce format ? François 
                      Rossel - Nous n'avons jamais eu de format prédéterminé 
                      pour nos publications. Mais pour une collection, il fallait 
                      un format. Ce format légèrement carré 
                      était beaucoup plus pratique qu'un vrai format de 
                      poche parce que certains auteurs écrivent de longs 
                      poèmes avec des vers très courts et d'autres 
                      écrivent de courts poèmes avec des vers très 
                      longs. Ce format plus carré permet de faire entrer 
                      les textes de manière assez harmonieuse.Alain Rochat - C'est 
                      vrai qu'il a fallu défendre énergiquement 
                      le format 14x18 auprès de Pro Helvetia, plutôt 
                      que le 12x18 qui est le format habituel des livres de poche. 
                      Cela venait aussi de notre expérience préalable, 
                      je trouve désastreux de devoir couper des vers et 
                      d'ajouter des crochets en fin de lignes. Pour les rééditions 
                      également, ces proportions étaientt tout à 
                      fait justifiées. L'expérience a confirmé 
                      la cohérence du choix.
 Nous allons à présent 
                      toucher au domaine de la diffusion: la distribution est 
                      un réel problème pour l'édition romande 
                      et pour les petits éditeurs en général. 
                      Est-ce que vous arrivez tout de même à vendre 
                      des livres de poésie ? Est-ce que le livre de poche 
                      se vend mieux?  Alain 
                      Rochat - Nous avons trois types de clients. Des abonnés, 
                      des gens qui reçoivent automatiquement toutes les 
                      publications des éditions Empreintes. Il y en a peu 
                      et le nombre n'augmente pas. Je crois que cette manière 
                      d'acheter est aujourd'hui en perte de vitesse. Les gens 
                      préfèrent acheter ce qu'ils veulent, quand 
                      ils veulent, au moment où ils le veulent. La fidélité 
                      à un fournisseur n'est plus d'actualité. Après, 
                      il y a les librairies, nous travaillons en distribution 
                      directe avec les librairies et je crois que le système 
                      maintenant fonctionne convenablement, puisque ça 
                      fait 20 ans que nous le pratiquons. Enfin, nous travaillons 
                      par mailing : nous avons un fichier d'adresses, nous infomons 
                      les inscrits de nos publications, recevons des commandes 
                      directes. Il est évident que la poésie se 
                      vend peu, mais c'est la loi du genre littéraire. 
                      Je reste quand même plutôt surpris de voir que 
                      le public de poésie en Suisse romande est un public 
                      vivant, stable, fidèle. On peut dire que les Suisses 
                      romands ou les francophones de Suisse sont des grands lecteurs 
                      de poésie, en comparaison avec la France. Pour la 
                      collection Poche-poésie, qui est une collection de 
                      rééditions, nous vendons en moyenne 250 exemplaires 
                      par titre. C'est quand même significatif. Les auteurs 
                      et éditeurs comparables à Empreintes en France 
                      sont toujours surpris des ventes que nous faisons en Suisse 
                      romande par rapport aux leurs. Et ils ont les mêmes 
                      problèmes de distributions que nous : ce n'est pas 
                      seulement une question de distribution propre à la 
                      Suisse romande. Si on voulait entrer dans les grands réseaux 
                      de distribution, il ne faudrait pas éditer de la 
                      poésie, c'est sûr. Je voudrais terminer avec un coup 
                      de cur : quel est le livre que vous avez publié 
                      - et découvert en le publiant - qui vous a le plus 
                      marqué? François 
                      Rossel - Ma dernière "découverte" 
                      était Caroline Schumacher, dont j'ai beaucoup apprécié 
                      le recueil. En voilà une, par exemple, qui a permis 
                      au mur de ma cuisine d'entendre des vers.Alain Rochat - C'est 
                      difficile de répondre : je suis allé à 
                      Zurich récemment, nous avions organisé avec 
                      Payot une lecture de Klaus Merz. C'était une lecture 
                      bilingue, et j'ai entendu les textes de son recueil Déplacements 
                      - lus en allemand et en français. J'ai été 
                      très impressionné par l'extraordinaire finesse 
                      et la force de ses textes, avec une petite pointe d'humour 
                      désabusé parfois, mais aussi un regard à 
                      la fois fraternel et concis sur le monde. Je me suis dit 
                      : "charrette, ça c'est un sacré bon livre!" 
                      Et j'étais fier d'avoir pu éditer ce recueil, 
                      et de l'avoir publié dans une édition bilingue, 
                      avec le texte original en regard.
 Entretien réalisé par 
                      Pierre Leporidans le cadre de l'émission "Inserto" 
                      de la Rete2
 Radio Svizzera di Lingua Italiana
 
   (c) RSI, novembre 2004
   Page créée le 08.12.04Dernière mise à jour le 04.01.05
 
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